Depuis plus de 30 ans, le projet de l’Avenue Royale, un lien urbanistique entre bord de mer et centre-ville flotte au-dessus de la medina de Casablanca.

Ce projet s’enlise en raison de la multiplicité des intervenants et la complexité du fichier de l’habitat. Dans le cadre de ce grand projet de réhabilitation et de relogement, l’État offre une aide financière aux familles dont les maisons sont démolies ou menaçant ruine pour qu’elles aient accès à de nouveaux logements hors de la medina,
Sur les 3.644 bâtiments que compte l'ancienne médina, 792 sont classés comme devant être totalement démolis.
Entre 2021 et 2023, j’ai arpenté ces rues de terre, rencontré Achraf, Youssef, Hicham, Yaya, Amine, Hassan, Nawal, Amina qui ont accepté avec toute la gentillesse de leur monde que je les prenne en photo. En Dior, en Nike, parés de leur plus beau sourire, ils m’ont accompagné dans leur quartier. Certains travaillent au port qui jouxte la médina, tentent de faire la traversée (pour rejoindre l’Europe) armés d’une simple combinaison de plongée et de leurs rêves, dealent (car «voler c’est haram»), d’autres se battent pour ne pas être délogés par les autorités.
Leur quotidien et leur futur se jouent au milieu de maisons qui s’effondrent ou sont détruites.
Ce projet donne à voir la façon dont les politiques d’urbanismes et de préservation du patrimoine se font au détriment d’une population locale. Il témoigne des changements urbains, sociaux et économiques d’une ville qui, avec l’intérêt croissant des investisseurs, se construit un destin de métropole influente en mettant de côté un pan de sa population.

Les tonalités pastels que je donne aux photographies viennent apporter une rupture avec l’ambiance sombre qui pèse au dessus de la tête des habitants de ce quartier. Je tiens en utilisant des nuances couleurs a apporté une respiration, des points de lumière dans l’imagerie du lieu.